Lucien Hervé

En quelques mots

Lucien Hervé est l'un des rares photographes à allier philosophie humaniste et pensée architecturale. Ses cadrages en plongée, ses vues en oblique, un certain dépouillement et une volonté d'abstraction caractérisent un style photographique très différent de celui de ses contemporains. D'origine hongroise, László Elkán arrive à Paris en 1929. Attiré d'abord par la peinture, la musique et la mode, il commence à photographier en 1938 pour Marianne Magazine. Militant actif à la CGT et au Parti Communiste, il rejoint dès 1940 les rangs de la Résistance sous le pseudonyme de Lucien Hervé. Proche de l'école humaniste française d'après guerre, la carrière de Lucien Hervé prend un tournant décisif après sa rencontre avec Le Corbusier en 1949. Photographe attitré de l'architecte jusqu'au décès de ce dernier en 1965, Lucien Hervé est alors reconnu comme l'un des plus grands photographes d'architecture. Il collabore avec les architectes Alvar Aalto et Oscar Niemeyer, et se fait connaître pour ses très belles images de Chandigarh, Brasília ou du Thoronet. Il photographie aussi les grands chantiers parisiens, du siège de l'Unesco à la pyramide de Louvre. Durant sa carrière de soixante ans, il a eu de nombreuses publications et expositions dans des galeries et des musées à travers le monde (Virginie Chardin).

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lucienherve.com

L'artiste et Playtime

Propos de Marguerite Pilven, commissaire de l'exposition

Une commande passée par le magazine hongrois « Fotomuveszet » m’a donné l’opportunité d’étudier le travail photographique de Lucien Hervé. De façon intuitive, au fil de conversations avec Cyrille Weiner dont je découvrais également les photographies, l’idée de confronter leurs travaux a vu le jour. Leurs démarches présentent une intention essentielle : l’engagement social.

Les photographies choisies me paraissent emblématique d'un esprit moderniste porteur de valeurs collectives. Le CNIT que Lucien Hervé photographie le jour de son inauguration a été imaginé comme un grand centre d'expositions pour les créations industrielles. L'architecture moderniste a été pensée par ses créateurs sur le modèle d'une machine fabriquable en grande série, au même titre que la Ford (Model T). Le chantier de Brasilia montre l'élévation d'une ville-plateforme surgie de nul part et par laquelle le président Juscelino Kubitschek disait pouvoir obtenir « 50 ans de progrès en 5 ans ». La Défense partage avec la structure des villes nouvelles sa dalle surélevée qui sépare la circulation piétonne du flux des transport routier. La voiture est d'ailleurs un objet emblématique. Les photographies d'habitations modernes réalisées à l'époque la font souvent apparaître au premier plan, comme participant pleinement d'un temps nouveau.

Lucien Hervé a aussi cette façon particulière de  magnifier le travail de l'architecte, de nous faire entrer dans son propos structurant en se focalisant sur des détails. Ses compositions fragmentées, à la limite de l’abstraction, rapprochent l’architecte du plasticien : mise en relation du dehors et du dedans, circulation de la lumières, harmonie des volumes et des plans... Des aspects que l'on retrouve dans les oeuvres d'Emese Miskolczi et de Nathalie Regard.
Mon approche inédite de son corpus photographique (les oeuvres choisies n’ayant, pour la plupart, jamais été montrées) est filtrée par le propos de l'exposition : une réflexion sur l’habiter liée aux formes de représentations de l’espace construit.

Ses œuvres